samedi 12 février 2011

Le Jabulani et la pente inopinée de Kamil Zayatte.


’’Il est bon de suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant.’’ [André Gide].

KUWAIT CITY– La pente de la carrière de certains footballeurs Guinéens est aussi imprévisible que la trajectoire de Jabulani, le ballon officiel des 64 matchs du Mondial 2010, superbement organisé par l’Afrique du Sud avec une humanité touchante.

Jabulani, ce ballon parfaitement confectionné grâce à la technologie moderne, nous a simultanément enchantés et étonnés par ses destinations finales, à la fois imprédictibles et captivantes.

La Nouvelle-Zélande, invaincue en trois matchs nuls, a dû quitter tôt. Et l’Espagne, la meilleure des 32 équipes, a remporté la coupe.

L'âme de la Coupe du Monde, cependant, était dans le peuple d'Afrique du Sud. Les volontaires, en particulier, ont donné de leur temps seulement pour accomplir une partie du labeur qui, selon Nelson Mandela, était le leur.

Contre l’Uruguay, en quart de final, le penalty raté du Ghanéen Asamoah Gyan aurait peut-être ravi le rêve africain de jouer, pour la première fois, les demi-finales du Mondial. Mais le football, toujours imprévisible comme la trajectoire de Jabulani, a opté autrement.

Durant ce Mondial africain, le foot a apparemment boudé les joueurs Anglais, Français, Italiens ou même Brésiliens qui ont peiné a donné une performance digne de leur réputation. Il a fugitivement noué amitié avec l'Argentine, qui, jouant le seul moyen que son entraîneur, Diego Maradona, a su jouer, attaquait tout simplement comme si, pour avancer, il fallait uniquement aller en avant. L'Argentine a alors rencontré le mur allemand et, la brève tentative de Maradona comme entraîneur a pris fin.

Maradona n'y est pas arrivé à la finale. Il ne pouvait pas parce qu'il n'avait pas de défense. Mais on se souviendra de lui et de son équipe « attaquante ». Au moins il a essayé. Au moins son esprit était sportif autant que le geste patriotique des Uruguayens qui ont refusé de toucher, à la faveur de ce Mondial, leurs primes de matchs. Diego Forlán et ses coéquipiers ont ainsi voulu apporter leur soutien à leur pays qui se relevait de la crise financière universelle. Un exemple à imiter.

A chaque fois qu’il agitait les filets adverses, l'expression du visage de Diego Forlán qui, à mon avis, a mérité autant d’estime que quiconque dans ce tournoi, reflétait quelque chose digne d’un éminent rêveur.

Pareillement, en bon rêveur, visant plus haut, un jeune de Kindia a pu réaliser son rêve de figurer dans l'élite du football anglais, à Hull City, précisément.

Novice à Conakry, formé en France et révélé en Suisse, le défenseur international Guinéen Kamil Zayatte, a joué un rôle essentiel dans la toute première aventure de Hull City en Premier League ; donnant toujours le maximum de lui-même sur le gazon, mettant souvent sa tête là où d'autres n'auraient jamais osé. Et plus d'une fois, il est réapparu sur la pelouse avec la tête bandée.

Son aptitude polyvalente lui a permis d’être à la fois le capitaine, le catalyseur, le stratège et parfois l’attaquant qu’il faut quand le moment est sombre pour le Syli National, la sélection nationale de Guinée.

Mais, contre toute attente, comme la trajectoire de Jabulani, Zayatte vient de s’engager en faveur du club turc Konyaspor pour six mois avec une option pour deux ans !

En hiver 2009, Hull City a décliné les offres de Tottenham et West Ham qui voulaient recruter Zayatte. Le transfert à Leicester au début de cette saison a échoué à la dernière minute à cause de leur offre qui n’a pas attiré le joueur. Et depuis lors, il n’était plus en odeur de sainteté avec le président de Hull City.

Dans cette atmosphère, l’alternance titularisation et banc, la perspective d'une saison ou plus dans le Championship (D2 anglais) et l’envie de rejoindre ses deux enfants et leur maman en France - qui ne se sentaient plus à l’aise en Angleterre - l’auraient probablement découragé de rester à Hull City pour longtemps. Quoi qu’il en soit, dans ses 13 derniers matchs avec Hull City, sa performance a été, en grande partie, inférieure à sa prouesse habituelle.

Il se peut qu’il n’ait pas été, régulièrement, solide et immuable. Zayatte a souvent marqué des buts salvateurs pour Hull City et plus d'une fois par erreur, contre elle, tremblant ainsi ses propres filets à un rythme qui était devenu presque gênant pour lui et le club.

Peut-être que le temps de Zayatte en Angleterre reviendra. Peut-être qu’il réapparaîtra en août prochain, à la défense d’un grand club de Premier League, qu’il désire le plus. « Si j’arrivais à jouer dans les grands clubs comme Manchester United, Arsenal ou Chelsea je crois que cela serait aussi une fierté pour tous les Guinéens. » a-t-il dit à Guinéefoot© en février 2010.

Dans la vie, si tu oses rêver, parfois, ces rêves peuvent devenir réalité. Mais, pour obtenir quelque chose que tu n’as jamais eu, tu dois faire, parfois, quelque chose que tu n’as jamais fait.

Le terrain de Zayatte a sans doute changé, mais sa détermination ne doit prendre aucune fissure.

Dans un mois, il célébrera son 26e printemps. Tout en lui souhaitant joyeux anniversaire, espérons qu’il parvienne à donner tort aux sceptiques en prouvant que sa pente inopinée - en quittant l’Angleterre pour la Turquie - n’est pas ’’descendante’’ et réussisse à retrouver, sans tarder, l’élite du football anglais.

/___Moysekou.

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